Les défis des tests utilisateurs sur appareils mobiles
Les consommateurs utilisent de plus en plus leurs appareils mobiles pour se connecter à Internet et pour accomplir diverses tâches quotidiennes. Dans ce contexte, on peut comprendre que les entreprises qui offrent des services sur ces plateformes cherchent à en évaluer l’efficacité, par l’entremise de tests utilisateurs.
Les tests utilisateurs traditionnels, c’est-à-dire ceux sur des ordinateurs de table et réalisés en laboratoire, visent généralement à évaluer des sites Web ou des applications téléchargeables. Différents outils sont utilisés pour évaluer comment les usagers utilisent ces applications : questionnaires, oculométrie, vidéo qui filme le visage de l’utilisateur, enregistrement de l’écran, analyse physiologique, etc. La plupart de ces méthodes sont maitrisées par les agences de marketing électronique. Cependant, quand vient le temps d’exécuter des tests utilisateurs sur des téléphones intelligents ou des tablettes, de nouveaux défis se présentent.
Les particularités des plateformes mobiles
Certaines fonctionnalités des applications et sites mobiles reposent sur des caractéristiques intrinsèquement liées aux appareils mobiles, tel que la géolocalisation, la connectivité à Internet en tout temps, la réalité augmentée, etc. Ainsi, contrairement aux tests utilisateurs traditionnels qui tentent d’évaluer l’utilisabilité de sites Web ou des applications traditionnelles, le contexte joue un rôle important dans l’utilisation des appareils mobiles. Ainsi, ces fonctions propres à la mobilité rendent les tests utilisateurs plus ardus puisque le contexte mobile ne peut pas toujours être recréé en laboratoire.
Par exemple, afin de tester une application qui est centrée sur la géolocalisation, il est pratiquement impossible de générer un environnement adéquat en laboratoire afin que l’usager puisse tester ces fonctions. Même chose pour la réalité augmentée. Ces fonctionnalités requièrent que l’utilisateur soit sur le terrain pour que le test soit complet et pertinent.
Mais alors, comment procéder pour ces tests sur le terrain? Y-a-t’il moyen de tester une application mobile sur le terrain en recueillant autant de données qu’un test traditionnel en laboratoire?
Oui et non. Bien qu’il existe plusieurs méthodes pour tester sur le terrain, il faut accepter le fait qu’il est impossible d’obtenir autant de données qu’en laboratoire. Cependant, la donnée recueillie sera plus riche que celle en laboratoire dans certains cas. En fait, tout dépend de ce que l’on désire mesurer en bout de ligne, comme le démontre ce tableau suivant :
Les avantages et désavantages de chaque méthode
Il faut noter que pour l’instant, il n’existe aucune application qui enregistre l’écran des téléphones intelligents ou tablettes à distance, comme il existe sur PC, pour enregistrer la vidéo. On perd ainsi une fonctionnalité cruciale sur le terrain. Cependant, il existe des dispositifs qui permettent d’attacher une caméra qui filme le téléphone tout en demeurant relativement portable (emphase sur « relativement »). Le problème avec ces dispositifs est qu’ils sont onéreux, complexes, mais par dessus tout, très encombrants pour l’utilisateur, qui doit traîner tout l’attirail requis pour faire fonctionner ce dispositif. On serait porté à croire que l’effet d’immersion est alors perdu, puisque trop de distractions viennent déranger une utilisation dite naturelle.
Ainsi, une autre méthode pertinente consiste à observer un utilisateur qui utiliserait une application mobile sur le terrain, et lui faire verbaliser ses observations à voix haute, soit en l’enregistrant ou en l’accompagnant sur le terrain pour l’observer. Certes, on perd la donnée vidéo, mais d’un autre côté, on obtient de l’information beaucoup plus riche, puisque l’utilisateur en fait une utilisation qui se rapproche beaucoup plus de la réalité.
Finalement, on peut aussi passer un questionnaire suite à son expérience sur le terrain, mais on risque de perdre les données plus pointues que l’utilisateur risque d’oublier.
Le tableau suivant présente sommairement les avantages et les désavantages de chaque méthode de test :
On remarque que chaque type de test a une utilité, et qu’il peut parfois être difficile de choisir lequel préconiser au détriment de l’autre. Que faire si l’on veut évaluer l’ergonomie d’une application qui utilise la géolocalisation par exemple?
…Et pourquoi pas les deux?
Pour compenser les lacunes de chaque méthode, il est possible de faire un test hybride, c’est-à-dire une partie en laboratoire, et une partie sur le terrain. Les deux composantes servent alors à mesurer des caractéristiques différentes mais complémentaires. Par exemple, pour une application de réalité virtuelle, on pourrait mesurer l’ergonomie de l’interface en laboratoire et ensuite, la validité des résultats de la réalité virtuelle sur le terrain. La complémentarité de ces deux tests fournissent ainsi de l’information très riche, qui fournit un portrait détaillé de l’utilisabilité d’une application. Un travail ardu, certes, mais qui, en bout de ligne, offre un portrait beaucoup plus complet.
Source: Zhang, D., Adipat B (2005). « Challenges, Methodologies, and Issues in the Usability Testing of Mobile Applications », International Journal of Human–Computer Interaction, 18(3), 293–308